Sophie Agnel, Ben Lamar Gay, Pascal Niggenkemper et Sam Pluta sont multiples, ils sont connus pour ça, pour être un peu démiurges sur les bords, créateurs et malmeneurs de mondes. C’est-à-dire qu’ils n’arrêtent pas les choses dans leur élan, et ils ne classent rien. Aux sources du son et dans ses profondeurs, il y a toujours d’autres sons, des torsions et des contorsions, une ombre derrière une lumière derrière une ombre : un commerce de transparences et d’opacités, le bureau des cartes. On pourrait imaginer un golem, qui cette fois-ci ne serait pas fait d’argile mais de cuivre, de cordes et de câbles, relayant toutes les informations, toutes les sources, tous les sons. Révélant que toutes les sources sont des ressources, ni plus ni moins, qu’elles soient acoustiques, électriques ou électroniques. Et ce sera souvent à s’y méprendre : le cornet d’abondance passe dans l’ordinateur porte-clé, qui passe dans la contrebasse-terre, qui passe dans le piano passe-partout : tout est affaire de greffes et de griffons. Les instruments sont joués, préparés, trafiqués, amplifiés, filtrés, pris et repris, comme des alevins dans la rivière, comme des galets dans la rivière. La musique est la rivière.
26 juin, The Bridge 2.5 se lance, jamais dans le vide, au Confort Moderne. Festival Bruisme, organisé par Jazz à Poitiers: tout est affaire d’infimes révélations, de froissements et de froissages, sous la surface des sons.
De bancs de sons et de poissons.
27 juin, Ben Lamar Gay et Pascal Niggenkemper s’apprêtent à ouvrir toutes les portes et toutes les fenêtres du Vélo Théâtre à Apt. Avec Sophie Agnel (qui a pris la photo, mais prépare aussi son piano, son harmonica, ses clochettes) et Sam Pluta (c’est lui le maçon de l’électronique), ils donnent une réponse chimérique, la seule réponse qui vaille, au nom de ce festival: Le Son des Peuples.
28 juin, il est minuit à Luzillé, dans la Cappozzone. C’est l’heure et l’or d’un Trumpet Summit entre Jean-Luc Cappozzo et Ben Lamar Gay. Prénoms composés, noms improvisés, langages secrets.
30 juin, Guipavas, avec le Programme d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile, sur le parking d’un ancien hôtel Formule 1. Mais on n’est jamais avec un programme, on est avec des Afghans ou des Guinéens. Avec des êtres humains sur Terre. Dans la chaleur humaine.
30 juin, Brest. The Bridge 2.5 est en plongée au Vauban, près des Plages magnétiques. On a vu des sirènes. On a entendu leur chant. De loin, un auditeur en or les a comparés à Don Cherry featuring Fennesz. On pourrait dire ça. On peut tout dire. On a le droit. Direction Dijon maintenant.
1er juillet, Dijon. Nous sommes en été mais nous sommes au Singe en Hiver, grâce aux alliés de Zutique. Sam Pluta attend le début du concert en trio cette fois-ci avec Ben Lamar Gay et Pascal Niggenkemper, dans le grenier de la grange de la galaxie. Où dans un instant ils brasseront tout ce qu’il est possible de brasser, en matière de sons, dans le vif de cette matière première.
2 juillet, Montpellier. Au fond de La Baignoire, Ben Lamar Gay a retrouvé Denis Fournier, le batteur, le percussionniste et le puma d’Escape Lane (The Bridge #6), pour un duo de caresses et de griffures parfois auréolées de légendes et de récits, de bonnes aventures.
3 juillet, Rodez. Dans le noir, le très lumineux obscur du Musée Soulages, Ben Lamar Gay et Pascal Niggenkemper ont ritualisé comme on vaporise, comme on poudroie. Pour faire apparaître les formes dissimulées, les toujours premières formes de vie. Les nébuleuses.
5 juillet, Lille. À La Malterie, chez les flibustiers de Muzzix, Peter Orins a commencé par un solo d’enroulements et de déroulements, une vraie genèse aux percussions, avant que The Bridge 2.5 au complet de nouveau (ici Sophie Agnel, partageant son temps et ses bras entre clavier et table d’harmonie) ne rouvre les lignes de communication et de transmutation.
6 juillet, Pantin. Il y a des vagues sous-marines – on dit parfois des marées internes – qui soulèvent des profondeurs dans les profondeurs, qui superposent des profondeurs et les écoutent craquer sous leur poids insensible. Il y a des geysers. Comme à La Dynamo de Pantin ce soir-là.
7 juillet, Lyon. The Bridge 2.5 est à Lyon, au Périscope, pour Radio Béguin, pour Radio Terrasse, après Nuits, le quartette. C’était parfois un banc de brume, c’est maintenant aussi la meute de loups qui le fend. Sophie Agnel, Ben Lamar Gay, Pascal Niggenkemper et Sam Pluta sont partis à la recherche de nouveaux déséquilibres.
8 juillet, Pont de Cirou, aux portes de l’Aveyron. L’association AJAL nous a aussi ouvert les portes d’un autre monde dans un autre village, où le sens de l’hospitalité entre les habitants et les habités est comme le sens de l’hospitalité dans la musique. Musique ouverte à son tour, musique offerte entre ciel et terre.
10 juillet, Luz-Saint-Sauveur dans les Pyrénées. Le Festival Jazz à Luz, dans son cirque de montagnes, c’est une convention de mutants et de mutantes, c’est le tribunal de la Confrérie des pirates qui libère tout le monde, et c’est là que le quartet se termine entre chien et loup et dragon, et s’évapore, soulful, et promet de revenir.
Au sommet du rocher Saint-Michel d’Aiguilhe. Les dragons ne sont terrassés que dans les contes. Dans la vraie vie, ils jouent une musique de toute beauté.
Et ils ont un nom désormais: Pang! Et des histoires encore à raconter, d’anciennes et de futures légendes…
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Coup double sur le Bridge #2.5
Zutique Productions, Un Singe en Hiver, Dijon, jeudi 2 juillet 2020 Le jeudi, c’est low-f(r)i. Au Singe en…