Le récit d’Oscar

Mercredi 23 octobre 2013, Nantes

Les fantômes emmènent les musiciens dans un monde parallèle : le monde du son. Ils font un voyage intergalactique. Ils se réveillent dans un arbre. Des génies de la musique tournent autour d’eux. Des Aborigènes sont en train de chanter et de danser, et les invitent à jouer. Ils jouent. Près du feu, des musiques très étranges. Des personnes imaginaires s’animent dans le feu. Ils jouent à chat. On dort. Le lendemain, ils sont réveillés par des lions et des feuilles. Les Aborigènes et les lions s’accouplent. Ils dansent très vite, très très très vite. Ils dansent toutes les danses possibles en même temps. Un chamane arrive. Il parle. Il joue de l’imagination, son instrument, en parlant. Les musiciens ne savent pas ce que c’est. Mais ils jouent aussi. La danse s’arrête. Les musiciens partent. Les bébés lions-aborigènes offrent de belles fleurs. Ils partent dans le désert, c’est monotone. Ils ont oublié de prendre de l’eau, mais pas les instruments. Ils sont désespérés, mais ils jouent. Ils hallucinent, ils voient quand même les touches, les cordes, les peaux. Ils voient leurs contrebasses monter dans le ciel…

Jeudi 24 octobre 2013, Poitiers

Et puis ils voient toutes sortes d’animaux fantastiques partir dans tous les sens. Certains s’envolent, d’autres marchent. Ils hallucinent. Mais se dire que leurs amis et leurs familles sont au-delà des dunes leur donne du courage. Ils tombent de fatigue. Beaucoup plus tard, ils sont réveillés par des nomades – en étant plus précis : des fous (comme eux). Mais pas la même sorte de fous. Des fous qui marmonnent et les remettent (les musiciens) en esclavage. Ils les portent pendant des jours et des jours. Ils se réveillent, et paniquent pour certains, d’autres leur disent de rester calmes car ils ont un plan. Le plan : jouer, jouer sans arrêt, tout le temps. Deux semaines après, ils jouent toujours. Trois semaines, quatre semaines. Puis les nomades décident de leur parler et se réconcilient avec eux (entre fous). Tout le monde jouer en marchant, en courant, jusqu’au marché aux esclaves. On se dit au revoir, mais les musiciens sont quand même vendus comme esclaves. Ils s’échappent deux jours après, parce qu’ils font du jazz et qu’il n’y a pas de place pour eux dans le monde de Vivaldi. Ils marchent à travers la Kabylie. Ils arrivent dans la vallée des singes. Ils chantent et jouent avec les macaques. Ils les interrogent (pour parler avec eux, il suffit de jouer, et de cligner des yeux). La marche reprend. Il pleut. On transpire de froid. Puis les musiciens se réveillent à Poitiers, en train de jouer devant moi et les autres. J’écoute…

Samedi 26 octobre 2013, Avignon

Ils repartent dans une histoire imaginaire. Ils galopent sur un pingouin jusqu’au Pôle Nord. Ils rencontrent encore une tribu, mais cette fois ces sont les Inuits qui sortent des igloos de feu. Ils ressemblent à des zombies. Ils sont tristes. Les musiciens jouent pour eux, mais ça ne change rien. Les musiciens jouent plus fort et, à leur grand étonnement, les Inuits se mettent à jouer avec eux, bruyamment, doucement, tristement, joyeusement, joliment, mochement… Ils jouent en tout cas, une musique de fous.

Oscar Pierrepont